Apéro-thématique n°6 - Défense du droit des femmes
Avec Ghita El Khyari, Directrice du Secrétariat « Women’s Peace and Humanitarian Fund » à UN Women, NYC

Un parcours entre le Maroc, la France et les Nations Unies
Après avoir passé son bac au Maroc avec succès, Ghita El Khyari intègre le MRIAE. Elle y partage son temps entre le magistère et un poste à mi-temps au Conseil Régional d’Île-de-France auprès de la présidente en charge des relations internationale.
En 2006, elle a l’opportunité de faire un stage d’été aux Nations Unies à New-York puis elle est recruté par l’Office des Nations Unies contre la Drogue et le Crime (ONUDC) à Genève à la sortie du Magistère. Un premier contact avec la bureaucratie onusienne qui s’avère décevant pour elle.
Un second master d’économie du développement à la London School of Economics en poche, elle réussit le concours de la diplomatie du Ministère des Affaires Étrangères au Maroc. Elle apporte notamment son expertise dans le domaine des relations entre le Maroc et les pays anglo-saxons, sur les droits de l’Homme et participe au préparatifs entourant l’entrée de son pays au Conseil de Sécurité en tant que membre non-permanent en 2012. Néanmoins, l’éclatement des événements du printemps arabe la pousse à quitter le Ministère pour se lancer dans une carrière tournée vers les Nations Unies.
En effet, elle intègre le bureau de l’organe ONU Femme (UN Women) à Rabat où elle gère des projets relatifs à l’égalité femme-homme à divers échelle jusqu’à ce que lui soit proposé un nouveau programme à New-York : ouvrir un fonds visant à garantir les droits des femmes dans les contextes de crise et de guerre.
Premiers pas à New-York
Lancé en 2016, le fond géré par Ghita bénéficie actuellement d’un budget de 20 millions de dollars qui sert à financer des actions dans sept pays dits « fragiles » parmi lesquels le Burundi, la Colombie, la Jordanie, le Nigéria, le Malawi ou encore les îles du Pacifique. Monter ce fond a été un travail de longue haleine entre fund raising auprès d’États donateurs comme le Royaume-Uni ou la Norvège, de grandes multinationales telles que Starbucks, une tâche qui requiert de mettre ses hésitations de côté et de faire preuve de persévérance, jusqu’à la sélection les pays bénéficiaires. Un lourd travail qui s’appuie beaucoup sur l’image diffusée par des ambassadrices des droits des femmes comme Louane et Kristen Bell.
Ce fond permet de financer des projets dans des États « en crise » et confrontés à divers problèmes de développement. L’un des objectifs prioritaire est d’aider les femmes à participer à la vie publique des pays. En ce sens, les ressources sont allouées à des associations faisant une demande de financement auprès du fonds. Selon Ghita, une des opération financée par le fonds la plus réussie est la mise en place d’un réseau femmes dans le but de gérer les conflits au niveau communautaire. Elles abordent ainsi des questions comme les viols, les grossesses non désirées mais aussi l'intégration des jeunes et la réintégration dans la vie civile des anciens miliciens. Déjà près d’un million de Burundais soutiennent cette initiative, un véritable succès pour un pays qui compte environ 11 millions d’habitants.
En plus de ces projets à l’échelle locale, le fonds permet également de faire intervenir des victimes et des témoins de violence devant le Conseil de Sécurité de l’ONU afin de renforcer les rapports entre les échelles d’action locale et globale.
Chargée d’étudier l’évolution des pays dans lesquels opère son fonds et de superviser les projets, Ghita a ainsi l’opportunité de beaucoup voyager et d’aller sur le terrain à la rencontre des bénéficiaires de son financement.

Des conseils pour les étudiants souhaitant travailler pour Nations Unies
Outre la bureaucratie et le poids de la hiérarchie particulièrement lourds, Ghita nous a confié regretter le manque d’expérience sur le terrain de certains fonctionnaires internationaux aux Nations Unies malgré le système de rotation mis en place depuis l’arrivée d’Antonio Guterres. Elle a notamment déconstruit deux clichés sur l’ONU.
Premièrement, tous les fonctionnaires internationaux ne sont pas polyglottes ! Ensuite, il y a une certaine forme de « précarité » à travailler aux Nations Unies. En effet, les Contrats à Durée Indéterminée n’existent pas et même les plus hauts-représentants se voient renouveler leur contrat tous les ans.
Ghita a également partagé de nombreux conseils à l’attention des étudiants souhaitant travailler aux Nations Unies. Selon elle, une première expérience est primordiale et il existe de nombreux programmes qui permettent cela. On peut citer notamment les programmes Junior Professional Officers (jeunes experts associés), les Volontariat aux Nations Unies (VNU) ou encore les nombreux stages dans les bureaux nationaux des Nations Unies.
Passionnée par les droits de l’Homme et des femmes, Ghita porte un regard très positif sur son travail totalement multiforme et où aucune journée ne se ressemble. Nous la remercions chaleureusement nous avoir partagé ses expériences et ses conseils avec nos étudiants !